129 milliards[1], c’est le nombre de masques jetables utilisés chaque mois dans le monde depuis de début de la pandémie de Covid-19 en 2020. Ces masques ont sauvé énormément de vies et font désormais partie de notre quotidien, mais à quel prix? En effet, nous avons tous remarqué ce changement dans nos paysages; des masques usés, trainant ici et là sur les trottoirs, dans les parcs, au bord des fleuves, et même à côté des poubelles.
Le problème majeur des masques jetables est qu’ils ont besoin de procédés spécialisés afin d’être adéquatement recyclés. Ils sont composés de polypropylène, un matériel plastique non-dégradable[2]. Un seul masque peut libérer jusqu’à 173000 fibres microplastiques par jour dans l’eau de mer.[3] Ils deviennent alors un vrai désastre écologique laissé dans la nature, tout comme n’importe quel autre déchet plastique. D’un côté, ces particules plastiques sont nocives pour la faune et la flore, puisque les animaux vont être contaminés via l’eau des rivières et leur nourriture. En conséquence, les humains vont consommer à leur tour ces animaux (poisson, bœuf, etc…). C’est toute la chaîne alimentaire qui est touchée, et ça n’a rien de nouveau, puisque le plastique en général a toujours été un problème écologique majeur.
L’impact sur la faune et flore est alarmante : généralement, comme tout autres déchets, les masques voyagent dans les égouts des villes, pour continuer leur chemin dans les fleuves et rivières qui finalement se retrouveront dans les océans. Les espèces marines sont donc fortement impactées par cette nouvelle vague de plastique [4] : certaines espèces les confondent avec leur nourriture et les ingèrent, les tuant pour la plupart. D’autres, comme les tortues se retrouvent emmêlées dans les fils élastiques du masque.
Un autre problème du masque jetable est qu’il est à utilisation unique. Une fois utilisé, il est jeté et plus ou moins détruit. En effet, les masques font partie des Déchets d’Activités de Soin à Risques Infectieux (DASRI). En somme, il s’agit de matériel médical. Or, le matériel médical est d’abord désinfecté avant d’être incinéré[5]. Le problème ici est que non seulement le processus d’incinération coûte cher, mais il est aussi loin d’être éco-responsable : brûler ces bouts de plastiques entraîne des rejets de dioxines, une substance très nocive pour les humains[6]. Les masques se retrouvent donc majoritairement enfoui dans les sols pour un coût moins onéreux, mais tout aussi nocif pour l’environnement.
La situation au Québec…
L’entreprise américaine TerraCycle offre ses services de récupération de masques à usage unique au Québec. TerraCycle rassemble les masques dans un centre en Ontario, puis les envoie en Illinois pour commencer le processus de recyclage. Les entreprises Sanexen et Multirecycle du Québec, envoient leurs masques à l’État de New York pour les faire incinérer afin de convertir la vapeur en énergie, ce qui n’est pas considéré comme du recyclage. Plusieurs environnementalistes critiquent ces solutions offertes par ces entreprises, invoquant les effets néfastes sur l’empreinte carbone associés au transport[7]. Il existe toutefois des entreprises québécoises portant leurs activités uniquement au Québec, comme l’entreprise Go Zero. Cependant, ces entreprises font face à un grand enjeu: les coûts. Les coûts de recyclage se situent entre 8000$ et 20 000$ par tonne[8]. Le président de Go Zero affirme que moins de 1% des masques en circulation sont vraiment recyclés. Ceci est grandement dû aux enjeux de la collecte. Les boîtes de collecte offerte par Go Zero coûtent entre 20$ à 1550$ et peuvent contenir de 100 à 10 000 masques. Plusieurs ne sont pas d’accord avec les dépenses gouvernementales ou même corporatives pour ce type de projet, accusant cette initiative comme étant une contribution minime au plus grand problème de recyclage au Québec. Ils proposent de se concentrer sur l’ensemble de la gestion des matières résiduelles. Recyc-Québec hésite toujours à émettre ses recommandations, puisqu’il est souvent difficile d’obtenir des informations tel que la traçabilité des matières récupérées et des procédés utilisés auprès des entreprises[9].
Malgré tous ces enjeux, la planète continue de payer pour notre gestion inadéquate en situation de crise. Il est important de ne pas oublier l’impact de nos gestes quotidiens et d’être alerte aux solutions qui nous sont offertes. Nous pouvons tous agir à notre échelle et limiter cette pollution supplémentaire engendrée par la pandémie.
Par Vaema Corre et Stéphanie Taillon
[1] LEJTENYI, Patrick (2021). « Davantage de microplastiques provenant des masques jetables aboutissant dans l’océan, indique une nouvelle étude de Concordia », Université Concordia, partie Actualités : https://www.concordia.ca/fr/actualites/nouvelles/2021/10/06/davantage-de-microplastiques-provenant-des-masques-jetables-aboutissent-dans-locean-indique-une-nouvelle-etude-de-concordia.html
[2] DUPONT-BESNARD, Marcus (2020). « Masques jetés dans la rue : quel impact sur l’environnement ? », Numerama, partie Science : https://www.numerama.com/sciences/629542-masques-jetes-dans-la-rue-quel-impact-sur-lenvironnement.html
[3] Sud Ouest (2021). « Covid-19 : comment les masques sont une catastrophe pour les milieux marins », Sud Ouest, partie Santé : https://www.sudouest.fr/sante/coronavirus/covid-19-comment-les-masques-sont-une-catastrophe-pour-les-milieux-marins-6403368.php
[4] SALMEN, Virginie (2020). « Coronavirus : quel est l’impact écologique des masques jetables? », Europe 1, partie Société : https://www.europe1.fr/societe/coronavirus-quel-est-limpact-ecologique-des-masques-jetables-3968985
[5] DUPONT-BESNARD, Marcus (2020). « Masques jetés dans la rue : quel impact sur l’environnement ? », Numerama, partie Science : https://www.numerama.com/sciences/629542-masques-jetes-dans-la-rue-quel-impact-sur-lenvironnement.html
[6] LEROUX, Rémi (2021). « Masques de procédure : peut-on s’en débarrasser de façon écoresponsable? », Protégez-vous, partie Maison et Environnement : https://www.protegez-vous.ca/nouvelles/maison-et-environnement/masques-de-procedure-peut-on-s-en-debarrasser-de-facon-ecoresponsable
[7] Gagné, L. (2021). « Québec paie pour récupérer des masques sans savoir Si c'est bon pour l'environnement » Ici Radio Canada. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1766460/recuperation-masques-procedure-ecoles-quebec-recyclage-incineration-revalorisation.
[8] Colpron, S. (2021). « Recyclage des masques : Le jeu en Vaut-il La chandelle ? » La Presse. https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2021-04-07/recyclage-des-masques-le-jeu-en-vaut-il-la-chandelle.php.
[9] Gagné, L. (2021). « Québec paie pour récupérer des masques sans savoir Si c'est bon pour l'environnement » Ici Radio Canada. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1766460/recuperation-masques-procedure-ecoles-quebec-recyclage-incineration-revalorisation.